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Le projet T-MARS

Analyse Minéralogique Terrestre par Télédétection

Le projet d'Analyse Minéralogique Terrestre par Télédétection (T-MARS, pour Terrestrial Mineral Analysis by Remote Sensing) est né pour répondre à l'un des principaux objectifs dans le domaine de l'exploration planétaire : documenter le passé géologique et les processus qui ont façonné la surface des planètes terrestres, de leurs lunes, des satellites glacés et des astéroïdes [1].

À l'échelle régionale

Les données de télédétection acquises par les satellites, également connues sous le nom d'images satellitaires, sont les premières composantes qui peuvent fournir de l'information sur les processus géologiques. Le mot «télédétection» signifie littéralement «détection à distance». Ainsi, les instruments de télédétection spatiale vont :

  • Acquérir des données dans différentes régions du spectre électromagnétique. Cela signifie que l'instrument situé sur le satellite mesure la force des rayons solaires qui sont réfléchis par la surface de la Terre ou des autres planètes. Cette mesure est effectuée pour différentes longueurs d'onde, selon la configuration de l'instrument.
  • Fournir des informations sur les propriétés de la surface à l'échelle du mètre au kilomètre. La force du signal reçu et enregistré par l'instrument dépend des propriétés de la surface visée par le satellite. Ainsi, l'analyse de la force du signal dans plusieurs longueurs d'onde (ce qu'on appelle la signature spectrale de la surface) permet d'identifier celle-ci. Dans notre cas, les surfaces d'intérêt sont celles où des processus géologiques sont apparents.

Les données de télédétection sont un outil crucial pour établir le contexte global à régional des processus géologiques et ils sont essentiels pour évaluer les emplacements qui doivent être étudiés à l'échelle locale.

À l'échelle locale

À la surface de la Terre où d'un autre corps céleste, des atterrisseurs, des astromobiles (rovers) ou des humains peuvent étudier les processus géologiques à l'échelle locale, de l'ordre de quelques mètres ou moins.

Les atterrisseurs et astromobiles qui sont allés sur Mars, sur la Lune ou sur des comètes se sont appuyés la plupart du temps sur l'utilisation d'instruments de télédétection à proximité de la surface pour caractériser celle-ci à une échelle aussi fine.

L'analyse des échantillons, sur place ou une fois ramenés sur Terre, fournit les informations les plus détaillées. Cela permet de réaliser des analyses isotopiques, élémentaires et minéralogiques approfondies.

Le projet en cinq aspects

Icône Mars
Aspect 1

Développer de nouvelles connaissances scientifiques concernant un processus géologique qui a façonné la surface de la planète Mars (les systèmes hydrothermaux)

Icône ADN
Aspect 2

Caractériser les biosignatures et développer des méthodes de détection applicables aux missions spatiales

Icône satellite
Aspect 3

Acquérir des mesures de télédétection hyperspectrales au sol pour valider les données d'une mission satellitaire terrestre active (WorldView-3)

Icône satellite
Aspect 4

Acquérir des mesures de télédétection hyperspectrale au sol qui sont prometteuses pour les futures missions satellitaires (comme HyspIRI et EnMap)

Icône drone
Aspect 5

Expérimenter des technologies spatiales innovantes, soit le drone et la spectroscopie de plasma induit par laser (LIBS)

Au cœur du projet

Former la relève de scientifiques du secteur spatial en impliquant nos étudiant(e)s dans les domaines de la télédétection, de l'astrobiologie et de la géologie, et en leur offrant une expérience pratique qui sera bénéfique à leur future carrière

L'étude des chapeaux de fer dans l'Arctique canadien

Nous nous concentrons sur l'étude des chapeaux de fer (gossans) réactifs dans l'Arctique canadien en tant qu'analogues aux systèmes paléo-hydrothermaux sur la planète Mars. Un système hydrothermal est un ensemble de phénomènes liés aux circulations de fluides chauds et riches en eau dans la croûte terrestre, activées par des réservoirs magmatiques. Dans notre cas, ces systèmes sont anciens (paléo).

Qu'est-ce qu'un chapeau de fer ?

Les chapeaux de fer sont des dépôts de surface qui se forment par l'altération d'un substrat rocheux riche en sulfures par des fluides acides (figure 1). Les sulfures se présentent sous forme de veines, de filons ou de gisements métallifères dans le socle rocheux. La surface des chapeaux de fer est ainsi caractérisée par la présence d'oxydes de fer et de minéraux d'altération, ce qui leur donne une couleur ocre (figure 2).

Les chapeaux de fer contiennent d'abondants minéraux d'altération dont la formation nécessite la présence d'eau. Sur la planète Mars, des minéraux d'altération similaires ont également été identifiés à partir d'instruments en orbite et installés sur les astromobiles (rovers) : cela suggère la présence d'anciens systèmes hydrothermaux sur cette planète, puisque la formation de ces minéraux nécessite de l'eau.

En apprendre plus sur notre région d'étude, l'Arctique canadien, et ses chapeaux de fer...

Processus de formation des chapeaux de fer

Figure 1 : Stratigraphie classique d'un chapeau de fer (gossan). (Harris et al., 2015)

Profil vertical d'un chapeau de fer

Figure 2 : Profil vertical classique d'un chapeau de fer. Île Axel Heiberg, Nunavut. (Williamson et al., 2011)

Des analogues aux systèmes paléo-hydrothermaux sur Mars

Les processus exacts qui ont conduit à la formation de chapeaux de fer sur Terre et de systèmes paléo-hydrothermaux sur Mars sont mal connus. Ceux-ci sont importants sur la planète Mars, car ils sont l'un des endroits clés pour rechercher des signes de vie.

Ces systèmes contiennent de la jarosite, un minéral qui est l'un des paramètres astrobiologiques clés pouvant être étudiés pour comprendre l'ancien environnement aqueux et l'habitabilité de la planète Mars. La teneur en potassium de la jarosite peut être utilisée pour déterminer le moment à laquelle l'eau était présente à l'emplacement de l'échantillon, par une datation 40Ar/39Ar [2,3], et elle peut préserver des composés organiques tels que l'acide aminé glycine [4].

Dans les climats humides, la jarosite se décompose pour produire des oxyhydroxydes de fer, un composé semblable à la rouille. Par conséquent, la jarosite peut uniquement être étudiée à des endroits où des conditions climatiques arides ont arrêté ce processus de dégradation [5].

La jarosite a été identifiée à plusieurs endroits sur Mars, notamment à Meridiani Planum (la plaine du Méridien) [6,7], Valles Marineris (les vallées de Mariner) [8,9] et Gale Crater (Cratère Gale) [10]. La jarosite a également été identifiée dans les chapeaux de fer de l'Arctique canadien [11], ce qui offre une occasion inestimable d'étudier la formation de systèmes paléo-hydrothermaux sur la planète Mars et de caractériser leurs biosignatures potentielles.

En apprendre plus sur notre région d'étude, l'Arctique canadien, et ses chapeaux de fer...

Références

  1. Canadian Space Agency (2017) Canadian Space Exploration - Science and Space Health priorities for Next Decade and Beyond, online (accessed 10-07-2019), Canadian Space Exploration: Science and Space Health Priorities 2017 report.

  2. Kula and Baldwin (2011) Jarosite, argon diffusion, and dating aqueous mineralization on earth and Mars, Earth and Planetary Science Letters, 310(3–4), 314–318.

  3. Martin et al. (2017) A two‐step K‐Ar experiment on Mars: Dating the diagenetic formation of jarosite from Amazonian groundwaters, Journal of Geophysical Research: Planets, 122(12), 2803-2818.

  4. Madden et al. (2004) Jarosite as an indicator of water-limited chemical weathering on Mars, Nature, 431(7010), 821-823.

  5. Christensen et al. (2004) Mineralogy at Meridiani Planum from the Mini-TES Experiment on the Opportunity Rover, Science, 306(5702), 1733-1739.

  6. Klingelhöfer et al. (2004) Jarosite and Hematite at Meridiani Planum from Opportunity's Mössbauer Spectrometer, Science, 306(5702), 1740-1745.

  7. Rampe et al. (2017) Mineralogy of an ancient lacustrine mudstone succession from the Murray formation, Gale crater, Mars, Earth and Planetary Science Letters, 471, 172-185.

  8. Percival and Williamson (2016) Mineralogy and spectral signature of reactive gossans, Victoria Island, NT, Canada, Applied Clay Science, 119, 431–440.